La Constance dans la foulée

par Sophie Bergeron

J’ai souvenir encore… de ma mère. Elle grelotte et elle est pressée de prendre un bain chaud. J’ai souvenir encore… l’odeur de la neige et du froid quand elle entre dans la maison. Vous savez tous de quelle odeur je parle et que seuls les coureurs savent reconnaître (bon, peut-être les skieurs aussi !). Elle revient de son jogging. Mes parents se sont divorcés quand j’étais toute petite et c’est ma mère qui nous avait à temps plein. Courir, c’est ce qu’elle faisait pour évacuer le stress et être patiente avec nous. Et puis, moi, pendant la pandémie, j’ai suivi son exemple. C’était le tourbillon : j’étais la CFO d’une compagnie en processus de vente, enceinte avec deux jeunes enfants isolés à la maison, une maison en rénovation et un conjoint qui travaille autant sinon plus que moi. Du stress et de l’inconnu, il y en avait beaucoup trop ! Alors, je suis sortie, j’ai respiré et j’ai couru. Un bébé dans la poussette, les 2 autres en trottinette et hop!

Ça n’a pas pris longtemps pour que j’aille la piqure et, comme je suis très exigeante envers moi-même, je voulais m’améliorer. Strava est devenu un allié : je pouvais comparer chacune de mes courses, voir mon évolution, apprendre et m’assurer de suivre les programmes que je glanais un peu partout. Ça m’a pris du temps à vouloir courir avec d’autres, même si j’avais plein de Kudos et de beaux messages de support sur l’app. Je craignais de ne pas être assez bonne, de ralentir les autres, qu’ils me jugent ou trouvent leur sortie plate. Mais en même temps… En gang, on se dépasse, on appartient à quelque chose. Jeune, j’ai longtemps pratiqué du sport de compétition. Ça me manquait. À force de me faire répéter par des amis de les accompagner, j’ai pilé sur mon orgueil et j’ai fini par y aller. Guess what ? Tout d’un coup, je pouvais courir un bon 45 sec/min plus rapide que d’habitude, en parlant ! Je me suis découvert de nouvelles forces. J’ai des coureurs exceptionnels autour de moi et je regarde toujours ce qu’ils font. Mon chum rit de moi quand je m’exclame « wow, Julien a fait 2 :45 à son marathon !!! ». Voir des gens qui ont de gros emplois du temps comme moi se dépasser, avoir des objectifs et les atteindre, je trouve ça super motivant. Quand on est ensemble, on se time : eux font leur sortie lente et, moi, ma rapide, pis c’est ben parfait comme ça ! Ça ne m’enlève rien du tout de voir leur succès ou leur vitesse, au contraire, ça me prouve qu’avec de la constance, de la discipline, de l’endurance, on y arrive. Je n’avais jamais fait plus de 16km quand j’ai réussi mon demi-marathon ! Semblerait, par contre, que faire du wake surf tout l’après-midi la même journée et faire de la randonnée le lendemain, ça veut aussi dire que je n’ai pas assez poussé...

Je continue d’apprendre sur moi à chaque sortie, même les mauvaises. Je ne serai probablement jamais aussi bonne que je rêverais de l’être, je dois tenir compte de ma réalité et de mes priorités, des sorties en famille. Pis ça aussi, c’est ben correct.